Alors que l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) sombre dans une crise sécuritaire et humanitaire sans précédent, une initiative des églises pour instaurer la paix divise le pays. L’Église catholique et l’Église protestante ont lancé un "Pacte social pour la paix", une démarche consultative visant à apaiser les tensions. Mais cette initiative, aussi noble soit-elle, se heurte à un refus catégorique de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le parti au pouvoir. Un clash entre spiritualité et politique qui révèle les fractures d’une nation en crise.
L’Église dans l’arène politique : une mission dépassée ?
Dans une déclaration ferme datée du 11 février 2025, l’UDPS a clairement signifié que les églises "dépassaient leurs prérogatives". Pour le parti présidentiel, les institutions religieuses n’ont pas à se substituer aux autorités gouvernementales légitimes. "L’Église doit encourager la paix et l’harmonie, mais sans empiéter sur le terrain politique", a martelé l’UDPS, rappelant son attachement à la laïcité de l’État. Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement, a renchéri en affirmant que le président Félix Tshisekedi n’avait "jamais autorisé une telle ingérence".
Un "Pacte social pour la paix" aux contours flous.
Portée par la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC), l’initiative des églises soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Qui sont les acteurs impliqués ? Quel est le cadre précis de ce dialogue ? Les églises affirment vouloir inclure même les groupes armés soutenus par des puissances étrangères, une ambition qui semble utopique sans un mécanisme clair et légitime. Pour l’UDPS, cette démarche manque de transparence et suscite des doutes sur ses réelles intentions.
L’UDPS : "La paix oui, mais pas à n’importe quel prix"
L’UDPS ne rejette pas l’idée de paix, bien au contraire. Mais le parti estime que cette mission doit revenir aux institutions de l’État, seules habilitées à mener un dialogue national. "Les églises, malgré leurs bonnes intentions, ne peuvent pas se substituer aux acteurs politiques", a insisté l’UDPS. Dans un contexte où la souveraineté nationale est fragilisée, le parti appelle à des solutions conformes à la Constitution, sans ingérence extérieure.
Un débat qui dépasse les frontières religieuses
Ce bras de fer entre l’UDPS et les églises met en lumière une question cruciale : qui doit piloter la résolution des crises en RDC ? Pour l’UDPS, la réponse est claire : les institutions républicaines. Les églises, bien que respectées pour leur rôle moral, ne doivent pas s’immiscer dans un jeu politique déjà complexe. "La paix ne se construira pas sur des bonnes intentions, mais sur des choix politiques responsables", a conclu l’UDPS.
Alors que la RDC traverse l’une des périodes les plus sombres de son histoire, ce débat souligne l’urgence de clarifier les rôles de chacun. Le "Pacte social pour la paix" des églises, bien que porteur d’espoir, devra surmonter de nombreux obstacles pour convaincre. Une chose est sûre : sans un cadre légitime et inclusif, cette initiative risque de rester lettre morte.
Franck YENGA