Lors d'une plénière tenue ce jeudi 26 décembre 2024 dans la salle de l'hôtel de ville de Kisangani, le député provincial Aimé Eyane, élu de la circonscription électorale d'Opala, a exposé une motion incidentielle relative à la situation administrative préoccupante des agents et cadres des circonscriptions foncières de la Tshopo.
Cette intervention survient après la prise de l’arrêté numéro 0026 du 10 décembre 2024 par la ministre d’État en charge des Affaires foncières, qui a créé un bicéphalisme administratif, notamment dans la circonscription foncière de Kisangani-sud, où il y a eu deux camps : d'une part, un conservateur des titres immobiliers et le chef de division du cadastre, réhabilités par le gouverneur de province, une réhabilitation contestée par plusieurs agents qui reprochaient aux réhabilités l'incompétence, et d'autre part, un conservateur et un chef de division nouvellement nommés par la ministre.
Le député Eyane a rappelé les origines de cette crise, notamment le conflit intercommunautaire qui avait opposé les communautés Mbole et Lengola depuis février 2022. La vente irrégulière de terres à la société Cap Congo avait été pointée du doigt comme un élément déclencheur, entraînant la suspension de deux cadres clés, Florent Pago et Peter Bondonga. Bien que cette mesure disciplinaire ait été levée ultérieurement, elle n’a pas permis de rétablir la sérénité, les accusations d’incompétence et les manifestations ayant suivi.
Selon l'élu d'Opala, l’arrêté ministériel du 10 décembre, visant à promouvoir une administration foncière non tribale, a, au contraire, créé un autre problème. En nommant 4 nouveaux conservateurs des titres immobiliers, 4 chefs de division et 36 chefs de bureaux, principalement non originaires, et en mettant les remplaçants en attente de nouvelles affectations dans d'autres provinces, l’arrêté a violé l’article 21 de la loi numéro 16/013 du 15 juillet 2016, qui interdit de priver un agent public de son emploi sans nouvelle affectation ou interruption de service.
« La Tshopo ne saurait être un terrain d’expérimentation pour endiguer le phénomène du tribalisme. Si l'on veut faire des permutations, que cela concerne toutes les provinces en même temps, car tout le monde sait que c'est à la Tshopo où tout le monde se sent à l'aise. Tous les fonctionnaires, d'où qu'ils viennent, se sentent à l'aise. La ministre ne peut pas venir ici à la Tshopo mettre des gens à la rue en attendant de nouvelles affectations », a-t-il dit.
Le député Aimé Eyane a ajouté :
« Dans une province récemment victime de conflits intercommunautaires à Lubunga, on vient donner l'impression à la population que ce sont ces nouveaux animateurs de circonscription foncière qui vont renégocier le processus d'octroi de terres à Cap Congo sans que les fils et les filles de la province ne participent à ce processus. Cela ne rassura pas les protagonistes».
Face à cette situation, le député Eyane a formulé deux recommandations clés :
1. Rétablir les cadres dans leurs postes initiaux en attendant la promulgation des nouvelles affectations sur l’ensemble du territoire national par la ministre.
2. Mettre en place une commission tripartite regroupant le ministère des Affaires foncières, le gouvernement provincial et l’Assemblée provinciale pour trouver une issue concertée à cette crise.
Le député a également dénoncé la politisation de l’administration publique.
La motion d’Aimé Eyane a été saluée par tous les députés. Après la présentation des limites des prérogatives de l'organe délibérant sur cette question, la plénière a adopté une seule recommandation : celle de la constitution d'une délégation composée de l'Assemblée provinciale, du gouvernement provincial et de quelques élus nationaux, qui se rendra à Kinshasa pour examiner ce dossier avec la ministre de tutelle et trouver une solution.
LEHANI SALUMU DAVID